Cet été, préférez ne pas !
N’hésitez pas : bartlebysez-vous sans tarder bien qu’aucune nouvelle traduction de Bartleby, le scribe ne pointe à l’horizon. Non que depuis 1853 les anciennes fussent défectueuses, datées ou insatisfaisantes (celle, historique, de Pierre Leyris a longtemps paru inégalable). Mais le chef d’oeuvre comique de Herman Melville est de ceux dont la restitution dans une autre langue est une sorte de sport et de loisir dont on ne se lasse pas. Ne fut-ce que pour une phrase, la plus célèbre, celle qui tient toute la nouvelle, sa formule alchimique dont on n’a pas fini de creuser l’énigme souterraine: « I would prefer not to », rendue selon les versions par « Je ne préfèrerais pas » ou « J’aimerais mieux pas » ou « Je préfèrerais ne pas ». Ad libitum. Si vous avez autre chose à proposer, ne vous gênez ou, nous ferons suivre à Melville. Borges traduisait par « Preferiría no hacerlo… ». Tout se complique quand on sait que même en anglais, la forme est agrammaticale car il eut été plus correct, et tellement moins génial, d’écrire « I had rather not ». Tout cela pour faire l’apologie de la résistance passive, mutique, inerte et irrémédiablement désolée à travers l’un des personnages les plus inoubliables qui soient. Dans son éblouissante postface à la traduction de Michèle Causse (GF, 1989), Gilles Deleuze rappelle un mot de Proust selon lequel les beaux livres nous paraissent toujours écrits dans une sorte de langue étrangère. J’avoue un attachement particulier à la version de Jérôme Vidal parue en 2004 avec des illustrations de l’excellent Jean-Claude Götting, sous le titre Bartleby, une histoire de Wall street (78 pages, 13,50 euros) aux éditions Amsterdam, une jeune maison qui se veut « démocritique »et s’est placée dès ses débuts justement sous la protection de l’auteur de Moby Dick, ce qui est très bon signe. Imagine-t-on un instant le nombre de lecteurs qui en ont […]
Lebwohl - Reconstructions of Death and Leave-Taking in Music by BarbarLes 10 Articles les plus récents
473
commentaires
1774
commentaires
1634
commentaires
1609
commentaires
Nicolas Bouvier, de Genève à Genève en passant par le reste du monde
1238
commentaires
2439
commentaires
473
commentaires